Les cancers colo-rectaux sont les cancers digestifs les plus fréquents et en France, en 2012, plus de 42 000 nouveaux cas ont été diagnostiqués. L’âge moyen au diagnostic est de 70 ans et la survenue de ce type de cancer est très rare avant 40 ans, et augmente à partir de 50 ans. Le cancer se développe à partir de la muqueuse, c’est à dire de la paroi interne du rectum, et envahit progressivement toutes les couches qui le forment. Dans plus de 80% des cas, il se forme à partir d’un polype adénomateux, une tumeur bénigne qui évolue lentement avant de devenir cancéreuse.

Quels sont les symptômes d’un cancer du rectum?

Les symptômes liés à la présence d’un cancer du rectum sont variables. Ils peuvent être totalement absents durant une longue période, la lésion se développant lentement. Le symptôme le plus typique est la modification soudaine et persistante du transit intestinal: apparition d’une constipation ou d’une diarrhée, alternance de diarrhée et de constipation, une sensation d’évacuation incomplète lors des selles… De même, la présence de sang dans ou autour des selles doit alerter le patient. D’autres symptômes comme l’apparition de glaires dans les selles, ou la découverte d’une anémie peuvent évoquer la survenue d’un cancer du rectum. Tous ces symptômes ne signent en aucun cas un cancer du rectum, néanmoins leur  survenue doit inciter les personnes à consulter leur médecin traitant puis un gastro-entérologue pour la réalisation d’un bilan endoscopique. En cas de découverte d’une anomalie pendant la coloscopie, des biopsies seront réalisées afin de prouver la nature cancéreuse des lésions.

Quel est le traitement du cancer du rectum?

La découverte d’un cancer du rectum requière la réalisation d’un bilan exhaustif, comprenant au moins un scanner du thorax et de l’abdomen, ainsi qu’une écho-endoscopie rectale ou une IRM. Ceci permet de stader exactement la maladie pour voir s’il existe une atteinte des ganglions, voire des métastases à distance. De plus, la localisation exacte de la tumeur est nécessaire avant de décider toute prise en charge thérapeutique. En effet, le rectum, est divisé en trois partie: le haut, le moyen, et le bas rectum.

Même si la base du traitement curatif du cancer du rectum reste la chirurgie, la localisation exacte de la tumeur et son stade vont modifier la prise en charge thérapeutique de ces lésions.

Les cancers du haut rectum peuvent être assimilés à des cancers du colon et leur traitement ne reposera que sur la chirurgie, plus ou moins chimiothérapie post opératoire en fonction du stade lors de l’examen de la pièce (cf traitement des cancers du colon). 

En revanche, le traitement des cancers du moyen et du bas rectum est différent, et en fonction du stade, il est souvent proposé une radiothérapie, ou une radio-chimiothérapie pré-opératoire. La chirurgie a alors lieu 6 à 8 semaines après la fin du traitement en cas de radio-chimiothérapie (cas le plus fréquent) ou une semaine après la fin du traitement en cas de radiothérapie seule.

La décision de réaliser un traitement préopératoire dépend des différentes explorations mais aussi de l’examen du chirurgien, et il est donc primordial de rencontrer son chirurgien dès le diagnostic de cancer du rectum.

Tous les dossiers sont discutés en RCP (Réunion de Concertation Pluridisciplinaire, qui réunit des chirurgiens digestifs, des gastroentérologues et des oncologues, plus ou moins des radiologues, des anatomopathologistes, des radiothérapeutes…). En fonction de la localisation et du stade de la tumeur, il sera proposé soit une chirurgie d’emblée, soit un traitement pré-opératoire à type de radiothérapie ou de radio-chimiothérapie. En cas de métastases hépatiques ou pulmonaires, une chimiothérapie première pourra être envisagée avant une éventuelle chirurgie.

Après la chirurgie, en fonction des résultats anatomo-pathologiques (examen de la pièce au microscope), il sera décidé en RCP si le traitement chirurgical a été suffisant ou s’il faut réaliser une chimiothérapie post opératoire.

Comment se déroule l’intervention?

 

  • Avant la chirurgie:

Un régime dit « sans résidus » sera à réaliser pendant une semaine avant l’intervention, et une préparation colique (une purge ou un lavement par l’anus selon les cas) sera habituellement réalisée avant la chirurgie. Dans tous les cas, une immuno-nutrition pré-opératoire (compléments alimentaires destinés à diminuer le risque de complications après la chirurgie) vous sera prescrite pendant une semaine avant l’intervention.

Si on prévoit la réalisation d’une stomie, un marquage pré opératoire sera réalisé (en général la veille ou le matin du bloc) afin de localiser au mieux la position ou celle-ci doit être placée pour permettre une gestion facile en post opératoire.

L’intervention nécessite une hospitalisation classique avec une entrée la veille de l’intervention et une durée post opératoire de 5 à 15 jours.

 

  • La chirurgie:

La chirurgie est habituellement réalisée par voie cœlioscopique, mais des contingences techniques (taille de la tumeur, antécédents chirurgicaux, difficultés de dissection) peuvent faire réaliser une ouverture par laparotomie (grande cicatrice passant par le nombril). On laisse habituellement en place des drains qui seront retirés pendant l’hospitalisation.

La chirurgie du cancer du rectum consiste en une ablation du rectum malade associée à un curage ganglionnaire. Le type de chirurgie va dépendre de la localisation de la tumeur lors du diagnostic.

Si la tumeur se situe dans la partie haute du rectum, le chirurgien effectue une résection antérieure du rectum (colon sigmoïde + partie haute du rectum). Il rétablit ensuite la continuité par la réalisation d’une anastomose (une couture) entre le colon restant et le rectum restant. On parle alors d’anastomose colo-rectale.

Si la tumeur se situe dans la partie moyenne ou basse du rectum, il est nécessaire d’enlever tout ou presque tout le rectum, et le colon sigmoïde. On rétablit ensuite la continuité par la réalisation d’une anastomose colo-rectale basse s’il reste suffisamment de rectum ou une anastomose colo-anale (entre le colon restant et l’anus) sinon.

Parfois, la tumeur est très bas située et on ne pourra pas conserver l’anus. On réalisera alors une amputation abdomino-périnéale avec une stomie (un anus artificiel) définitif. Il est à noter que la décision de réaliser une stomie définitive est discutée avec le chirurgien lors des consultations pré-opératoires et cette décision est prise avant la chirurgie, en accord avec le patient.

 

  • Après la chirurgie:

Après la chirurgie, on utilise un protocole dit de « réhabilitation accélérée ». La réalimentation est rapide, de même que la reprise de la marche (le soir même ou le lendemain). En cas de réalisation d’une stomie, vous serez éduqué sur la prise en charge de celle-ci durant l’hospitalisation.

La durée habituelle d’arrêt de travail est de 3 à 4 semaines mais sera adaptée à votre activité professionnelle, à votre état physique, et à la présence ou non d’une stomie. De même, un repos sportif de 4 à 6 semaines est recommandé afin de permettre une cicatrisation satisfaisante des tissus.

Une consultation de suivi à 1 mois post opératoire sera programmée à la sortie avec votre chirurgien. En cas de présence d’une stomie, la consultation permettra de planifier la fermeture de cette stomie qui nécessite une réhospitalisation et une courte intervention.

Vais-je avoir une stomie (un anus artificiel)?

En dehors de quelques cas particuliers qui seront discutés en consultation avec votre chirurgien, on ne prévoit pas de stomie définitive.

Néanmoins, la chirurgie rectale étant à risque de fuite (fistule) particulièrement en cas de couture basse, il est possible que votre chirurgien préconise la réalisation d’une stomie provisoire qui dévie les selles le temps que la couture en dessous cicatrise. Habituellement cette stomie est laissée en place durant 2 à 6 mois, et est refermée après avoir contrôlé la bonne qualité de l’anastomose (la couture) en dessous. Ceci nécessite une réhospitalisation et une courte intervention chirurgicale.

Quelles sont les complications de la chirurgie?

La complication principale de la chirurgie du rectum est la fistule anastomotique : c’est la fuite au niveau de la couture qui a été réalisée entre le colon restant et le rectum ou l’anus. Ce risque est de 10 à 15%, mais ses conséquences sont faibles en cas de stomie de dérivation durant l’intervention. Habituellement cette complication survient dans les 5 à 7 jours après l’intervention. Elle se manifeste par de la fièvre et des douleurs abdominales. Son diagnostic repose sur le scanner qui appréciera sa gravité, et pourra permettre dans le même temps la mise en place d’un drain. En cas de fistule grave, une réintervention en urgence est possible.

Les troubles urinaires sont fréquents (30 à 50% des cas) à type de rétention. Ils se manifestent surtout chez les hommes, sous la forme de rétention d’urine, et peuvent nécessiter de garder une sonde urinaire quelques jours. Ils disparaissent habituellement assez rapidement.

Les autres complications propres à cette chirurgie sont l’hémorragie, pouvant nécessiter une reprise chirurgicale, et l’abcès de paroi, habituellement traité par de simples soins infirmiers. Les autres complications (infection urinaire, phlébite, embolie pulmonaire…) sont plus rares.

Quelles sont les conséquences à long terme de la chirurgie?

L’ablation de tout ou partie du réservoir rectal modifie le transit et les troubles digestifs sont extrêmement fréquents après ce type de chirurgie. Il peut s’agir d’une augmentation de la fréquence des selles (3 à 4 par jour), d’un fractionnement des selles (nécessité d’évacuer en plusieurs fois en un temps limité) ou d’impétuosités (difficulté à retenir les selles avec sensation d’urgence). Il peut s’y associer des troubles de la continence responsables de fuites, surtout en cas d’anastomose colo-anale. Ces troubles sont fréquents mais varient en fonction de l’âge, des antécédents et traitements préopératoires et du type de chirurgie. Ils s’améliorent au cours des 2 premières années post opératoires, mais nécessitent parfois des traitements symptomatiques afin d’améliorer ces résultats.

Les troubles de la sexualité concernent environ 20% des patients opérés. Chez l’homme, le réseau de nerfs qui entoure le rectum a un rôle  dans l’érection et l’éjaculation qui peuvent donc être altérés par la chirurgie et la radiothérapie. On préconise d’ailleurs une un prélèvement de sperme avant la mise en route du traitement chez les hommes jeunes. Chez la femme, les symptômes rapportés sont des troubles de la libido, une sécheresse vaginale et des douleurs lors des rapports. Ces points seront abordés avec votre chirurgien lors des consultations pré et post opératoires. N’hésitez pas à poser toutes les questions qui vous préoccupent avec ce professionnel.

J’ai été opéré d’un cancer du rectum. Vais-je avoir une chimiothérapie après l’opération ?

Seule l’analyse de la pièce opératoire sous le microscope peut affirmer le stade de la maladie, aussi il est nécessaire d’attendre l’analyse définitive (qui prend généralement 2 à 3 semaines) avant de décider de la suite du traitement.

La chimiothérapie adjuvante (c’est-à-dire réalisée après la chirurgie) peut être proposée lorsque les ganglions sont atteints (stade III) mais le patient est toujours libre d’accepter ou non le traitement.

Toutes les décisions post opératoires sont prises de façon collégiale au cours de RCP (Réunion de Concertation pluridisciplinaire).

Si un suivi simple est décidé, il sera organisé en général entre votre chirurgien, votre gastro-entérologue, votre médecin généraliste et possiblement votre radiothérapeute ou cancérologue.

Pour en savoir plus

Télécharger la fiche d’information de la Fédération de Chirurgie Viscérale et Digestive sur les principes et les complications de la chirurgie rectale

Fiche information Chirurgie rectale FCVD(2)

Télécharger les guides InCa et HAS sur le traitement du cancer du rectum:

Liens Utiles

 Site de l’Institut National du Cancer (InCa):

http://www.e-cancer.fr/Patients-et-proches/Les-cancers/Cancer-du-rectum/Points-cles

Fédération des stomisés de France

 

 

 auteur: dr Tavernier